La Phytothérapie

PARTIE 4:
COMMENT UTILISER LES PLANTES ?

Sommaire :

Depuis que les plantes sont utilisées pour soigner, de nombreux modes d’utilisation ont été proposés. Certains assez peu usités comme les bains de siège et d’autres qui sont devenus des références comme les tisanes ou les gélules.

Faisons un peu le tour de ces modes d’emploi de la phytothérapie

En infusion

L’infusion est le mode d’utilisation des plantes séchées le plus connu. Il consiste à verser sur la plante à infuser de l’eau frémissante, c’est-à-dire tout juste bouillante, à une température de 80-90°C. L’infusion est particulièrement adaptée aux parties fragiles des plantes, telles que les fleurs ou les feuilles, ainsi qu’aux plantes riches en substances volatiles et aromatiques (huiles essentielles), qui se dégradent à trop haute température. C’est pour cette raison qu’il est conseillé de toujours couvrir son infusion : pour conserver tous les principes actifs.

 

La durée d’infusion varie de 5 à 10 minutes généralement, en fonction des plantes. Elle peut aussi dépendre des goûts de chacun. Dernier conseil : au moment de filtrer, il ne faut pas oublier de bien presser la plante, afin de récupérer tous les principes actifs.

Pour les puristes, il existe une autre forme de préparation pour réaliser une bonne infusion. Le principe reste le même, mais il s’agit ici de mettre les plantes dans l’eau froide, puis de faire chauffer doucement et de stopper le feu avant l’ébullition. Cette forme permet de réhydrater doucement la plante sans l’agresser, comme on le ferait en versant directement l’eau chaude dessus.

Je vous renvoie à « l’art du thé » pour comprendre à quel point la préparation des infusions peut nécessiter de multiples précautions pour tirer le meilleur de la plante.

Ce mode d’emploi aurait sans aucun doute ma préférence, mais il n’est vraiment pas pratique. Pour autant, nous aurions surement intérêt à prendre l’habitude d’une tisane une ou plusieurs fois par jour, ne serait-ce que pour mieux digérer ou mieux dormir.

Je ne compte plus les patients qui ont réglé leurs problèmes de douleurs, de bouffées de chaleur ou de digestion lente grâce aux tisanes.

En décoction

La décoction est proche de la tisane. C’est le mode de préparation à privilégier pour les parties plus rigides et fibreuses de la plante telles que les racines, certaines graines ou encore l’écorce. 

Mais certaines feuilles ou tiges peuvent aussi le nécessiter comme le célèbre desmodium dont on utilise pourtant la partie aérienne.

Le principe consiste à mettre les plantes dans une casserole d’eau froide puis faire chauffer progressivement jusqu’à ébullition et laisser bouillir un temps déterminer suivant la plante utilisée. En général de 5 à 15 mn. Puis couper le feu et laisser infuser à couvert pour filtrer ensuite tout en pressant le marc.

On fait souvent 1 litre de décoction qu’on mettra dans une thermos pour boire en plusieurs fois dans la journée.

Pour des raisons de goût ou d’efficacité, on pourra ajouter dans la casserole, une fois le feu coupé, d’autres plantes à faire infuser dans cette décoction. Je fais souvent ainsi pour les décoctions de desmodium que j’associe au romarin ou à la menthe.

En compresse, cataplasme, crème ou lotion

Certaines plantes sont utilisées dans des formes « cosmétologiques » pour agir sur les maladies de peau ou pour des indications esthétiques.

Je ne développerais ces questions dans ce dossier. On trouve vraiment de tout dans ce domaine et parfois la meilleure solution est de se fabriquer soit même sa lotion à partir d’une infusion de plante.

Nos « grands-mères » utilisaient beaucoup ces applications à commencer par les grandes feuilles de choux pour les douleurs d’arthrose ou encore les cataplasmes d’ortie.

Ces applications se sont perdues dans notre monde moderne où on veut de la rapidité et de la simplicité et c’est peut-être dommage.

On peut aussi utiliser la phytothérapie de cette façon pour soigner des affections des yeux.

Demandez conseil à votre médecin, votre pharmacien ou votre herboriste.

En bain

On utilise ce procédé surtout avec les huiles essentielles, mais certains le pratiquent avec des plantes fraiches ou sèches comme la lavande. On réalise alors une sorte d’infusion, mais à l’échelle de la baignoire, et non pas pour la boire, mais pour son effet sur la peau, mais aussi son action olfactive.

Certains vont limiter cette pratique aux bains de siège, par exemple en cas d’hémorroïdes. 

Cela reste des pratiques « accessoires » en phytothérapie

Les inhalations

Sont réservées à l’aromathérapie même si certaines plantes riches en huiles essentielles pourraient être utilisées comme cela. C’est le cas de la lavande ou du thym, mais ça reste peu usité en phytothérapie.

En macération à froid

La macération à froid est aussi appelée infusion à froid. Le principe est simple, cela consiste à laisser les plantes en contact avec de l’eau froide pendant 10h à 12h à couvert, puis de filtrer en pressant le marc. Attention, l’eau étant un très mauvais conservateur, il ne faut pas laisser macérer les plantes plus de 10h au risque qu’il y ait une fermentation, et consommer le liquide dans les 24h pour éviter tout risque de développement microbien.

La macération à froid peut se faire sur la majorité des plantes, mais est particulièrement adaptée aux plantes riches en mucilages, telles que la Guimauve, la Gentiane, la Réglisse ou encore la Mauve, ainsi qu’aux plantes contenant des composés thermolabiles, sensibles à la chaleur.

La macération peut également s’opérer dans de l’huile végétale, souvent de l’olive ou du tournesol, pour obtenir les fameux macérats huileux. Ceux-ci peuvent être déclinés à l’infini, en variant l’huile de macération utilisée. Le mieux est tout de même de privilégier une huile de macération stable pour la conserver le plus longtemps possible. Le principe reste sensiblement le même, mais les plantes sont mises à macérer plusieurs semaines cette fois-ci, au soleil. L’huile est ensuite filtrée, et les plantes pressées pour en récupérer tous les principes actifs.

En vins et alcools médicinaux

Les plantes médicinales se prêtent parfaitement au plaisir d’un bon digestif après le repas, et même avant pour anticiper. En effet, elles peuvent être macérées dans un vin ou un alcool fort pour en faire un vin ou un alcool médicinal. L’objectif était évidemment une meilleure conservation et un plaisir bien différents des tisanes considérées plutôt comme une boisson de « bonnes femmes ».

L’alcool permet une extraction de certaines molécules qui ne peuvent pas l’être avec de l’eau. Mais on retrouve ici le défaut de l’alcool quand il est consommé avec excès.

Il s’agit donc ici d’une macération dans l’alcool qui dure entre 1 et 4 semaines selon la plante, en remuant le bocal tous les jours. Ensuite on va filtrer, presser le marc puis transvaser dans des bouteilles préalablement stérilisées.

Les vins médicinaux se conservent au frais, jusqu’à 6 mois, et les élixirs plusieurs années.

En teinture mère

La teinture mère est la méthode moderne des alcools médicinaux. Elles sont obtenues par macération de plantes fraîches dans de l’alcool, ou un mélange d’alcool et d’eau, permettant l’extraction des principes actifs. On parle également d’extrait hydro-alcoolique ou d’alcoolature. 

Ici on utilise un alcool le plus pur possible, de préférence entre 60 et 90° ou parfois à 45-50° du fait de l’évolution des législations.

D’après la pharmacopée française, la teinture mère est au 1/10ème du poids sec de la plante mise en œuvre. Ainsi, 10 parts d’alcool seront nécessaires pour une part de plante. Pour les plantes sèches, la teinture officinale est préparée au 1/5ème du poids de plante sèche.

Dans tous les cas, cela va diluer les principes actifs et nécessiter des quantités relativement importantes.

Les teintures mères se conservent plusieurs années, en flacon compte-goutte ambré et toujours bien fermé. 

Toutes les formes alcoolisées sont évidemment déconseillées aux femmes enceintes ou allaitantes et en cas d’affections hépatiques ou de sensibilité digestive.

En extrait fluide

Les extraits fluides, à la différence des teintures mères, sont obtenus par macération de plantes fraîches, ou de parties de plantes fraîches broyées, dans un solvant autre que l’alcool. L’extraction des substances actives des plantes se fait généralement dans un solvant à base d’eau ou de glycérine.

On retrouve fréquemment les extraits fluides (liquides) dans le commerce, mais il existe aussi des extraits mous (semi-solides) ou des extraits secs (solides). Ces deux dernières formes sont issues de la première : une fois l’extrait fluide obtenu, le solvant est alors partiellement ou entièrement éliminé. Différentes méthodes sont utilisées pour retirer ce liquide : la lyophilisation ou la nébulisation.

Les extraits fluides ont largement supplanté les teintures mères aujourd’hui quand on veut utiliser une forme liquide. Reste le problème de la « dilution » des principes actifs nécessitant souvent des quantités importantes du produit, ce qui n’est pas pratique et souvent plus cher que les extraits secs.

En gélules

La gélule de plante est la forme la plus utilisée, car c’est sans aucun doute celle qui offre le meilleur rapport qualité / prix / praticité !

Mais la qualité est très très variable, car beaucoup de distributeurs ont voulu se positionner sur ce marché avec des produits parfois très ordinaires pour ne pas dire inutiles. Cela étant lié à la législation particulière des gélules de plantes qui sont vendues comme compléments alimentaires sans qu’on impose des critères d’efficacité thérapeutique puisque ce n’est pas le but d’un complément alimentaire ! Vous voyez à quel point la situation est absurde.

Très difficile pour le grand public de s’y retrouver et de faire le tri entre les produits d’excellente qualité qui existent et les autres. Et même pour les bons produits il reste un écueil : la concentration et la posologie efficace qui peut nécessiter parfois 9 gélules par jour et même plus.

En effet, dans les gammes de gélules de plantes en poudre, on trouve de tout. Sans revenir sur la qualité des matières premières, j’ai constaté que certains ne mettaient pas que la plante active. On trouve parfois un peu de terre ou bien les parties inactives de la plante (la racine quand il faudrait la partie aérienne ou parfois l’inverse).

Reste enfin, même dans les produits de qualité, la concentration en principes actifs. Car les gélules de plantes peuvent contenir :

  • La plante fraiche simplement broyée qui sera donc très peu concentrée. J’ai ainsi vu des produits pour lesquels il aurait fallu 50 gélules par jour pour arriver à la dose efficace !!
  • Le totum de la plante, ce qui est parfait pour certaines, avec une concentration variable pouvant dépendre de la qualité de fabrication : élimination de l’eau incomplète, suppression des fibres inertes ou non, qui font qu’on obtient un extrait sec plus ou moins « concentré »
  • Les extraits titrés en principes actifs qui permettent de savoir quelle dose des molécules actives est présente dans chaque gélule.

Sans compter que les gélules de plantes peuvent contenir une seule plante ou plusieurs ou même d’autres ingrédients entrant dans la famille des compléments alimentaires.

Certains de ces complexes sont particulièrement bien conçus et sont très efficaces, mais parfois on se retrouve avec des doses de plantes totalement ridicules et donc peu efficaces.

Surtout que suivant les laboratoires, on peut aussi retrouver des excipients dans ces gélules qui réduisent encore la portion médicalement active. Parfois, il est obligatoire d’avoir un excipient pour pouvoir obtenir une poudre « pulvérulente » qui permette le remplissage de la gélule. Certaines plantes sans excipient donneraient une pâte trop compacte impossible à distribuer sous forme de gélule.

Pour cela on utilise en théorie des excipients neutres. Surtout de la silice ou de stéarate de magnésium, mais même pour ceux-là il existe des effets secondaires possibles.

LA COMPOSITION DES GÉLULES

Pour finir, il faudra aussi se pencher sur la composition et la qualité de la gélule. Le plus courant ce sont des gélules en gélatine. On trouve maintenant de plus en plus de gélules d’origine végétale, mais certaines sont en réalité un composé chimique d’origine végétale qui n’est pas non plus parfait. Certaines contiennent du dioxyde de titane par exemple.

Ainsi les premières gélules végétales proposées étaient à base de HPMC ou hypromellose. Or, ce composé d’origine végétale nécessitait l’emploi de solvants chimiques pour sa fabrication.

Aujourd’hui beaucoup de laboratoires sérieux ont abandonné ces gélules pour proposer réellement des gélules 100% végétales, souvent en pullulan issu de la fermentation du tapioca par un champignon alimentaire.

Il faut aussi que les gélules soient garanties sans OGM, sans colorants, sans dioxine de titane et sans agent de conservation. Elles sont aussi garanties sans gluten et sans lactose évidemment. Ce type de gélule est donc compatible si vous êtes végétarien, végan ou même si vous mangez kasher ou hallal.

C’est pourquoi certains laboratoires ont fait le choix de présenter leurs produits sous forme de comprimés et non pas de gélules. C’est une bonne idée, mais cela oblige à ajouter des excipients et beaucoup de patients ont du mal à avaler ces comprimés à la texture très « sèche » et désagréable. Sans parler du goût et de l’odeur parfois tout aussi désagréables.

Personnellement, si le patient n’est pas vegan, je ne suis pas opposé à la gélatine qui est bien tolérée et n’augmente pas inutilement le prix du produit.

Mais si on peut avoir des gélules végétales de qualité, c’est peut-être mieux. Dans ce cas la priorité est de vérifier l’appellation « gélules 100% végétales », mais ce n’est pas toujours suffisant. Certains laboratoires ont des labels de qualité et des garanties « sans adjuvant à risque » comme le titane.

Malgré toutes ces précautions, j’utilise préférentiellement les gélules de plantes, car elles présentent beaucoup d’avantages : 

  • Dans les extraits secs, on concentre le liquide extractif de telle sorte qu’il ne reste plus que 2 à 5% d’humidité. 
  • Ainsi un extrait sec est 4 à 5 fois  plus concentré que le totum alors que la teinture Mère est 10 fois plus diluée que la poudre totale
  • Ces extraits secs se conservent dans de bonnes conditions, ils ne s’altèrent pas ou peu avec le temps. 
  • Ils offrent une standardisation avec titrage possible en principes actifs ce que n’indiquent pratiquement jamais les formes liquides
  • Ils sont sans d’alcool et sans « goût »
  • Ils sont faciles à avaler et à transporter (au travail, en vacance …)
  • Leur prix est raisonnable et souvent bien inférieur aux formes liquides (surtout les extraits glycérinés)

 

Évidemment, rien n’étant parfait, les extraits secs en gélules présentent quelques inconvénients :

  • Le mode de fabrication peut faire perdre certains principes actifs comme les huiles essentielles et les minéraux. Mais c’est la même chose pour les formes liquides qui perdent encore plus de minéraux en général. Pour y pallier, on peut associer dans la même gélule l’extrait sec ET le totum de la plante.
  • La forme gélule est peu adaptée aux enfants, mais il est rare qu’on fasse appel à la phytothérapie avant 6 ans, âge auquel les enfants commencent à savoir avaler une gélule. Pour autant certains adultes ne savent toujours pas et dans ce cas ils devront ouvrir la gélule ou bien choisir une forme liquide. Pour autant, les gélules ont cette supériorité de pouvoir s’ouvrir alors que les comprimés secs devront être broyés ce qui est moins pratique
  • Présence parfois de certains excipients.
  • Présence et qualité de la gélule qui est un élément important, surtout si on doit en avaler un certain nombre tous les jours.

Au final, la seule forme qui n’ait pas ces inconvénients c’est la tisane, mais qui a les autres défauts pratiques cités plus haut.

Vous trouverez dans les parties suivantes de ce dossier quelques exemples des grandes plantes utilisées en phytothérapie

J’ai choisi de vous les présenter en fonction des grandes par indications, par pathologies. 

Dans tous les cas, mes propos sont là pour vous informer et vous aider à mieux connaitre les plantes médicinales, mais dans aucun cas ce dossier ne remplace une consultation médicale. Je ne recommande pas l’automédication et si vous présentez une des affections décrites ci-après, je vous invite à consulter votre médecin avant d’utiliser telle ou telle plante.

Il est toujours indispensable de faire un diagnostic précis et de rechercher les causes de chaque maladie avant d’envisager la prise de plantes médicinales, quelles qu’elles soient.

Pour aller plus loin, reportez-vous aux fiches :